Fibromyalgie : une maladie mystérieuse

Publié le par virginie

Douleurs articulaires, fatigue, troubles du sommeil… La fibromyalgie est quasi-inconnue en Europe. Pourtant aux Etats-Unis, elle représente près d'un cas sur dix d'invalidité. Doctissimo fait le point sur ce mystère avec le Dr Muller, spécialiste de la douleur.

Le 12 mai se déroule la Journée internationale de lutte contre la fibromyalgie : une journée qui risque de passer inaperçue en France. Très controversée, cette maladie n'a pas vraiment la cote dans l'Hexagone.

Une qualité de vie réellement altérée

La fibromyalgie concernerait entre 2 et 5 % de la population, principalement des femmes (70 à 90 %). Selon une étude israélienne, ce trouble ne représenterait pas moins de 10 à 20 % des motifs de consultation dans les services de rhumatologie ou de médecine interne1. Aux Etats-Unis, elle motive 8 % des rentes d'invalidité.

Ce trouble est caractérisé par des douleurs des muscles et des tendons le long du rachis, une fatigue et des troubles du sommeil. Ces symptômes peuvent s'accompagner de différentes manifestations : jambes sans repos, céphalées, intestin irritable, dysménorrhées, acouphènes…

En 1990, l'American College of Rheumatology adoptait les critères de classification de la fibromyalgie2 :

  • Douleurs diffuses dans la région axiale, c'est-à-dire le long de la colonne vertébrale, ainsi que sur les côtés droit et gauche du corps depuis au moins trois mois ;
  • Douleur à la palpation d'au moins 11 points douloureux sur 18.

"Compte tenu du fait que cette classification se base essentiellement sur la présence de symptômes subjectifs, on comprendra que l'approche diagnostique repose sur l'habileté clinique du médecin" reconnaît le Collège des médecins du Québec3.

On distingue également deux formes de fibromyalgie, les formes associées à des maladies organiques (polyarthrite rhumatoïde, Goujerot-Sjögren, infection chronique…) et des formes isolées. Difficile à identifier, cette maladie résiste à bien des explications.

Des causes mystérieuses

Malgré sa reconnaissance par l'Organisation mondiale de la santé4, la fibromyalgie reste aujourd'hui très controversée. Tout comme le syndrome de fatigue chronique ou la spasmophilie, cette maladie ne bénéficie pas d'éléments biologiques ou radiologiques permettant d'asseoir son authenticité. Mais c'est aussi le cas pour des maladies qui ne sont jamais discutées, comme la migraine. Alors, maladie psychosomatique ou organique ? "L'origine de cette maladie voit s'affronter les tenants du tout psychiatrique aux partisans du tout organique. La vérité est très certainement entre les deux" nous précise le Dr André Muller chef de service du centre d'évaluation et de traitement de la douleur de l'hôpital Hautepierre (Strasbourg).

D'un point de vue physiologique, plusieurs études principalement américaines ont évoqué différentes hypothèses :

  • Une anomalie musculaire5 ;
  • Des altérations du système endocrinien ou hormonal6 ;
  • Une infection virale7 ;
  • Une anomalie du système immunitaire8 ;
  • Une hypersensibilité à la douleur9

"Outre la qualité parfois discutable de certaines études, il convient de rappeler que corrélation ne signifie pas causalité. Pour faire un parallèle, on trouvera inévitablement une anémie chez les anorexiques, pourtant cette caractéristique n'est pas la cause de la maladie" tempère le Dr Muller.

Une indéniable composante psychologique

Contrairement à une opinion encore trop largement répandue, la fibromyalgie n'est vraisemblablement pas une maladie psychosomatique. Mais certaines caractéristiques psychologiques interviennent comme facteurs de déclenchement ou de pérennisation de l'affection. La maladie est souvent reliée à un événement initiateur (stress, traumatisme, anesthésie…) : on ne naît pas douloureux chronique, on le devient. Cette trace et l'absence de cause sont difficiles à admettre pour le médecin mais également pour le patient dont les examens ne révèlent rien.


Fibromyalgie : une maladie mystérieuse

"Une telle situation peut amener le médecin à diagnostiquer un trouble psychologique (parfois rapidement) ou au contraire à rechercher (parfois désespérément) des preuves d'une maladie organique…. selon son propre degré de résistance à l'écoute de la souffrance de l'autre !" commente le Dr Muller qui s'empresse de préciser que "Ce n'est pas parce que la plainte a une composante psychogène que la douleur n'est pas réelle !".

Cet expert recommande ainsi que l'avis d'un psychologue ou d'un psychothérapeute soit sollicité avant toute proposition de traitement. Non pas pour jeter la suspicion sur la réalité de la douleur mais pour prendre en compte tous les déterminants de la plainte douloureuse. A condition cependant que les patients soient prêts à consulter un psy… "Trop souvent, les personnes aiment bien regarder les psys à la télé mais n'envisagent sous aucun prétexte pouvoir bénéficier de leur aide…" déclare le Dr Muller.

Des traitements éprouvés

Symptômes peu caractéristiques, origine mystérieuse… Autant d'éléments qui prédisent une prise en charge relevant du casse-tête… Ce n'est pas tout à fait vrai. Bien qu'inconstante, certaines thérapeutiques ont révélé une efficacité incontestable :

  • Des antidépresseurs, particulièrement les antidépresseurs imipraminiques (tricycliques)10 ;
  • Des sétrons, utilisés pour minimiser les effets secondaires des chimiothérapies11 ;
  • Des antagonistes NMDA (kétamine, dextromethorphane, amantadine, méthadone…)12 ;
  • Une prise psychologique par thérapie de groupe ou de type cognitivo-comportementale a tendance à réduire les douleurs et améliorer la qualité de vie13 ;
  • Enfin, l'efficacité de certains régimes alimentaires reste très discutée.

Des traitements efficaces chez certains patients, des symptômes variés… Sommes-nous en face d'une seule maladie ou de plusieurs rassemblées sous le même nom générique ? "Il est bien difficile de répondre à cette question. Mais il convient de se méfier des gourous spécialistes de LA fibromyalgie, dont certains vont jusqu'à pratiquer la chirurgie des points douloureux !" nous recommande le Dr Muller avant de conclure "La prise en charge ne peut qu'être globale, alliant une prise en charge médicamenteuse et psychologique".

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<br /> Blog(fermaton.over-blog.com),No.10- THÉORÈME CONTRÔLE.-Vivre n'est pas maladie.<br />
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